Le Blongios nain ne peut pas être confondu. Il se distingue très aisément de tous les autres membres de la famille des hérons par sa taille minuscule, qui lui a valu son nom. Cette espèce est fortement menacée en région en raison de la petitesse de ses effectifs et de sa vulnérabilité au dérangement et à la modification des zones humides.
Le Blongios nain (Ixobrychus minutus) est une espèce de la famille des ardeidés (la famille des hérons, aigrettes, butors...).
Il est beaucoup plus petit que tous les autres membres de la famille des hérons, ce qui lui a valu son nom. En effet, sa taille est comparable à celle d’une tourterelle !
Une autre différence notable par rapport à ses cousins ardéidés européens est la différence d'apparence (appelée dimorphisme) qui existe entre mâle et femelle, là où les sexes sont identiques ou presque chez les autres espèces.
Selon le célèbre ornithologue Paul Géroudet, qui le décrit très bien, « le mâle adulte a un plumage jaune-ocre pâle tranchant nettement avec le noir du dos et de la calotte ; au vol, il offre une image plus contrastée encore, grâce aux grandes plages blanches arrondies qui couvrent la moitié antérieure des ailes noires. ». Chez la femelle, par contraste, « cet effet bicolore est atténué par la teinte jaune-brunâtre des couvertures alaires ; des bordures claires écaillent le dessus brun foncé, des rayures brunes assez floues marquent le dessous jaunâtre. » Les jeunes de l’année ressemblent beaucoup à la femelle, mais sont encore plus sombres et plus fortement rayés.
Le Blongios chasse à l’affût au bord de l’eau. Son alimentation est composée principalement d’insectes, de petits poissons et d’amphibiens. C’est lors de la recherche de nourriture que l’on a le plus de chances de l’observer. Soit il se poste à découvert en bordure de la ceinture de végétation, parfois dans une position acrobatique, soit il traverse des zones d’eau libre en un vol rapide et furtif entre deux massifs de roseaux ou d’autres plantes aquatiques.
d'envergure
Le Blongios nain a une vaste répartition mondiale.
L’espèce est présente et sédentaire dans presque toute l’Afrique subsaharienne, le nord de l’Inde, les côtes occidentales et orientales de l’Australie et une petite partie de la Nouvelle-Guinée.
Dans le Paléarctique en revanche, le Blongios est totalement migrateur.
Il se reproduit dans une vaste zone allant de la France et de la Péninsule ibérique aux Pays Baltes pour atteindre à l’est la région du Lac Balkhach au Kazakhstan et l’Iran.
Il est absent des Iles Britanniques, de Scandinavie et de presque toute l’Afrique du Nord.
La population ouest-européenne est très dispersée et seul l’est de l’Europe (Hongrie, Roumanie, Ukraine, Russie d’Europe) accueille des effectifs conséquents, estimés à plus de 75% de la population du continent.
L’hivernage se fait en Afrique subsaharienne et dans le sous-continent indien.
Le Blongios nain s’installe le plus souvent dans les marais, lacs et étangs pourvus d’une ceinture plus ou moins grande de plantes aquatiques de type roseaux ou massettes, appelées hélophytes. Il apprécie également à l’occasion la présence d’arbustes et notamment de saules.
La qualité des habitats doit être suffisante pour lui permettre de se procurer toutes les proies dont il a besoin pour survivre. Toutefois ses choix peuvent parfois questionner. L’espèce est ainsi absente de milieux qui lui paraissent très favorables et sont très tranquilles alors qu’elle choisit parfois de s’installer dans des endroits en apparence assez hostiles ! Ainsi, depuis quelques années, le Blongios fréquente quasi-régulièrement le Lac de la Bergeonnerie et les rives du Cher à Tours, milieux fortement urbanisés et très fréquentés par de nombreux promeneurs, pêcheurs et joggeurs, et où de surcroît il n’y a pas de roseaux et très peu d’autres végétaux pouvant l’accueillir ! Les mystères de la nature...
Les blongios sont assez fidèles à leur lieu de nidification. Le mâle, revenu le premier d’Afrique en avril-mai se signale aussitôt par son chant discret mais caractéristique, qui ressemble à des aboiements étouffés. C’est aussi lui qui détermine l’emplacement du futur nid. Celui-ci est construit en général entre 10 et 60 centimètres au-dessus de l’eau, normalement dans les roseaux ou bien dans les saules, mais parfois il peut être plus haut, plus loin de l’eau ou bâti dans d’autres essences.
Les pontes peuvent être assez étalées dans le temps selon les couples, allant de mi-mai à mi-juillet. L’incubation est assurée par les deux parents et dure de 16 à 24 jours. Les jeunes savent voler au bout d’un mois environ. Le départ des blongios vers l’Afrique a normalement lieu d’août à septembre mais il peut être exceptionnellement plus tardif, comme le montre notamment cette donnée d’un oiseau vu le 14 novembre 1987 à Monnaie, en Indre-et-Loire.
oeufs par ponte
couples en France en 2009-2012
Si en 1936 l’auteur Mayaud attribuait au Blongios le statut de nicheur sur tout le territoire national, la situation a depuis hélas bien mal évolué. Son domaine s’est fortement réduit et ne concerne plus actuellement que le littoral méditerranéen, le bassin du Rhône, la Lorraine, la Champagne-Ardenne, l’Île-de-France, les Hauts-de-France, le littoral Aquitain et la Centre-Val de Loire. Mais même dans ces régions, la distribution de l’espèce s’est contractée et elle est aujourd’hui très restreinte.
Lors de l’enquête Atlas 2009-2012, le Blongios a été signalé sur environ 300 mailles de 10 x 10 kilomètres en France, dont seulement 101 où la reproduction a pu être prouvée, situées à 85 % dans la moitié est du pays.
La population totale hexagonale est alors estimée à 280-520 couples pour tout le territoire (pour comparaison, elle était estimée à 2 000 couples en 1968). Le Blongios nain peut donc être considéré comme une espèce très rare et menacée en France.
Dans la région, le Blongios a été classé « en danger » dans la dernière liste rouge des espèces menacées de 2014.
Donnée en déclin, l’espèce était alors surtout présente en Brenne où sa population était d’une trentaine de couples maximum. 5 couples étaient estimés dans le Loiret et le Blongios était considéré comme disparu ou quasi-disparu ailleurs.
À la lumière des travaux conduits sur la mise à jour de la liste rouge en 2024, il est apparu que la situation avait légèrement changé dans la dernière décennie. Si la population du bastion brennou semble stable, tout comme celle du Loiret, l’espèce parait en revanche avoir augmenté en Indre-et-Loire, et notamment elle est apparue au Lac de Rillé où 3 à 4 couples sont présents aujourd’hui alors qu’elle n’y existait pas il y a 10 ans (la pression ornithologique forte sur ce site rend peu probable l’hypothèse selon laquelle elle serait passée inaperçue auparavant).
couples en Centre-Val de Loire en 2024
Les informations manquent pour savoir si cette petite reconquête est un épiphénomène ou si elle a également concerné d’autres secteurs de la région. Les départements d’Eure-et-Loir, du Loir-et-Cher et du Cher seraient toujours peu ou pas occupés, et n’ont fourni aucune preuve de reproduction depuis plusieurs décennies. Quoi qu’il en soit, le Blongios nain reste aujourd’hui une espèce fortement menacée en Centre-Val de Loire, en raison de la petitesse de ses effectifs et de sa vulnérabilité au dérangement et à la modification des zones humides.
Le Blongios nain est classé "en danger" en Centre-Val de Loire.
Le Blongios est en butte à diverses menaces, dont certaines sont difficilement mesurables, et pour lesquelles il est difficile d’agir, comme les mauvaises conditions d’hivernage potentielles en Afrique (sécheresses, régression des zones humides…).
En France, l’espèce est menacée également par les sécheresses de plus en plus fréquentes et intenses, qui exondent les sites de nidification.
Or l’espèce a besoin de zones humides à niveau d’eau constant jusqu’à la fin de l’été pour pouvoir accomplir son cycle de reproduction. Par ailleurs, la dégradation de la qualité des zones humides constitue également une menace, et notamment la pollution par les intrants agricoles ou la prolifération de poissons fouisseurs dans les étangs (carpes, amours blancs), qui diminuent la richesse en poissons, insectes et amphibiens, donc la ressource alimentaire du Blongios.
Enfin, le développement du tourisme estival sur certains plans d’eau et notamment l’essor d’activités comme la pêche ou le canotage pourraient avoir des conséquences importantes sur le succès de reproduction du Blongios, même si on a vu que l’espèce parait pouvoir s’accommoder de la présence humaine, dans une certaine mesure en tout cas.
Si la population de Blongios en Centre-Val de Loire semble s’être stabilisée au cours des 10 dernières années après des décennies de déclin continu, l’espèce reste très rare avec toujours moins de 100 individus matures reproducteurs, pour la grande majorité localisés en Brenne, dans l’Indre.
Sur les sites occupés par l’espèce qui ne sont pas déjà protégés, des mesures de gestion seraient souhaitables, comme la mise en place de zones de quiétudes et le maintien, voire le développement des massifs d’hélophytes. Lorsque cela est possible, une gestion favorable des niveaux d’eau permettant notamment d’assurer l’inondation des roseaux et des plantes associées jusqu’à l’envol des jeunes, doit être mise en œuvre.
Ce n’est qu’au prix d’efforts de conservation comme ceux-ci que nous verrons peut-être enfin le Blongios nain effectuer un retour durable dans le paysage naturel régional.
Blongios nain femelle © Loïc Bourgeois
Acteur
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