Val de Berry, bailleur social dans le Cher, a porté avec le Museum de Bourges un projet d'installation de gîtes à chauve-souris suite à la rénovation thermique de logements.
En 2018 ont eu lieu les Rencontres Nationales chauves-souris de la Société française pour l'étude et la protection des mammifères (SFEPM). Le Museum d'histoire naturelle de Bourges y avait alors lancé une alerte intitulée "Le Plan Climat ne doit pas oublier les chauves-souris" (Laurent Arthur, 2020).
Val de Berry, le Muséum d'Histoire Naturelle de la ville de Bourges et le bureau d'études Echochiros ont signé une convention de partenariat pour préserver la biodiversité et notamment les chauves-souris.
Des expérimentations sont alors lancées dans le Cher pour un accompagnement à l'installation de gîtes à chauves-souris lors des programmes de rénovation énergétique des bâtiments.
Le constat est le suivant : différentes espèces de chauves-souris s'installent dans les anfractuosités des bâtiments (corniches, joints de dilatation, espace au-dessus des linteaux...) et lors des rénovations thermiques notamment les travaux d'Isolation Thermique par l'Extérieur (ITE), ces espaces sont obstrués. Les chauves-souris sont alors privées de leur gîte ou parfois pire, emmurées vivantes. 500 000 logements sont concernés en France chaque année par le Plan Climat.
L'objectif est donc d'éviter la mortalité des chauves-souris lors des travaux et d'offrir de nouveaux gîtes de remplacement à ces animaux.
Une première étude sur l'occupation par les chauves-souris d'immeubles dans le nord de Bourges a été menée par Ghislain Durassier, alors stagiaire au Museum, en 2006. Cette étude confirme la nécessité de les prendre en compte lors des phases de rénovation.
C'est dire le défi de protéger ces espèces et de leur offrir des gîtes de substitution ou de nouvelles accessibilités sur les bâtiments rénovés si on ne veut pas vider nos villes de l'essentiel de leur faune chiroptérologique.
En tant que bailleur social, nous devons dès aujourd’hui agir en faveur de la biodiversité dans toutes ses formes. La préservation d’autres espèces animales est dès à présent prise en compte dans la réalisation de nos programmes.
gîtes installés dans le Cher en 2023 pour l'ensemble du programme
structures spécialisées dans les chauves-souris suivent le Plan Climat dans le Cher
Le Museum de Bourges, le bureau d'études Échochiros et l'association "Chauve-qui-peut"
Une dizaine de caissons suspendus avaient été installés par l'équipe du Museum à Bourges et Saint-Amand-Montrond, avec un suivi sur 5 ans. Les gîtes se sont montrés solides mais inoccupés. L'exposition à une trop forte variation de températures et d'intempéries pourrait en être la cause. Ces premiers gîtes ont tous été démontés en 2021 et 2022.
L'expérience n'était pas vaine car elle a permis la prise de contacts entre acteurs, et notamment entre le Museum et le bailleur social Val de Berry.
Dès 2018, de nouveaux essais et cette fois-ci, les gîtes sont intégrés dans les couches d'isolants thermiques par l'extérieur, au moment de la rénovation d'un bâtiment. Leur conception est pensée par les chiroptérologues du Museum de Bourges, en prenant en compte la solidité, l'aération, l'accès spécialisé pour les chiroptères, l'évacuation par gravité des urines et guanos, l'absence de pont thermique significatif créé...
Ces réalisations ont été permises par les relations professionnelles de confiance entre Val de Berry, le Museum et l'entreprise de construction.
En parallèle, des réunions d'information aux locataires ont été organisées.
6 nouveaux gîtes ont été conçus, à destination d'un bâtiment de l'Université de Bourges. Ceux-ci ont été réoccupés, dès la saison suivant la pose par les populations initiales d'une soixantaine de Noctules et de Pipistrelles. Une évacuation des animaux a été nécessaire au moment des travaux en 2019-2020.
Suite aux bons résultats de cette opération berruyère, il a été décidé de l'étendre à d'autres immeubles, à Saint-Amand-Montrond. Ici les immeubles n'étaient pas préalablement occupés par les chauves-souris. Les poses ont eu lieu début 2020 et dès l'été de la même année, les premières traces du passage de pipistrelles étaient repérées.
Des opérations de sensibilisation des employés de Val de Berry ont été menées, afin de "mieux connaitre et de mieux protéger les chiroptères".
Lors des projets de rénovation thermique des bâtiments, plusieurs actions de sensibilisation des habitant·e·s sont menées : réalisation de panneaux d'explications, distribution de notes d’information aux locataires, des conférences-animations au pied des immeubles, du porte-à-porte. Les résident·e·s peuvent ainsi adapter leurs comportements pour vivre en bon voisinage avec les chiroptères. Certain·e·s adoptent un rôle de « sentinelle », apportant ainsi leurs observations au Muséum.
Le suivi des populations de chauves-souris par le Museum est possible grâce à des suivis par endoscopes, par l'observation de présence de guano, et des comptages crépusculaires.
Bourges : plusieurs dizaines de noctules et quelques pipistrelles fréquentent les gîtes posés. L'opération de recolonisation est un succès. Le Museum a compté 34 interventions nécessaires pour l'opération de A à Z.
Saint-Amand-Montrond : les suivis sont encore en cours mais les premières observations sont encourageantes. Une quinzaine de visites du Museum ont été nécessaires pour l'implantation des nichoirs pendant le chantier.
Différents critères sont pris en compte pour améliorer au mieux l'accueil des chauves-souris : orientation des nichoirs, température, isolant utilisé, type d'aération... De plus, leurs besoins ne sont pas les mêmes qu'ils se trouvent en période d'hibernation, de reproduction ou de chasse. Des choix sont à opérer pour l'avenir de ces opérations et les changements climatiques compliquent parfois cette prise de décision.
La méthodologie du concept des gîtes inclus dans les isolations est évolutive. Elle s’affine en fonction des retours d’expériences. Les suivis de colonisation des nichoirs sont indispensables pour juger de la pertinence des actions. L’anticipation dans les travaux, les échanges entre les spécialistes des chauves-souris et les bailleurs sont essentiels. L’implication des résident·e·s à l’opération est un plus indéniable.
En 2023, tous les bailleurs du Cher travaillent dorénavant à la prise en compte de ces espèces dans l'habitat collectif. Il y a également un enjeu à effectuer de telles opérations sur les maisons individuelles qui prévoient des rénovations thermiques. Quelques tests ont été effectués en redimensionnant les gîtes posés.
Présentation du projet : Museum de Bourges et Val de Berry
Animatrice du Portail de la biodiversité et du Biodiv'Tour
Agence régionale de la biodiversité Centre-Val de Loire (ARB CVL)