Martial Queyrie, photographe du groupe « Photo’Cen », sort volontiers en toute saison pour photographier la nature. Il apprécie particulièrement l’hiver et nous explique pourquoi.
Je sors généralement tout seul, souvent en Sologne, en privilégiant les forêts de bois mort. En hiver, on va pouvoir observer des pics donc je recherche les arbres creux. La Sologne a un côté encore sauvage, il y a moins d’habitations, on y fait encore de belles rencontres.
Je pratique une manière de photographier plutôt statique. Je peux par exemple attendre plusieurs heures au même endroit.
Mon objectif est double : faire de la photo et être dans la nature. Je choisis mes sorties en fonction de la lumière. Alors, même quand il pleut, ou plutôt surtout quand il pleut, je sors ! Je choisis aussi en fonction des espèces que je souhaite photographier : si j’ai repéré les années précédentes un animal en particulier dans un coin les années précédentes, j’y retourne.
Je choisis mes sorties en fonction de la lumière.
En hiver, on peut si on a de la chance, voir des renards, des pics-épeiches ou pics-mars, des chevreuils… Pas beaucoup d’êtres humains, et c’est tant mieux…
J’y ressens de la sérénité, une certaine plénitude.
Il y a des instants magiques, des imprévus.
On apprend généralement sur soi-même, et les découvertes faites ne correspondent pas forcément à ce à quoi on s’attendait.
Il y a des instants magiques, des imprévus. Un épervier qui se pose à côté de moi sans que je l’aie vu arriver ; ou un campagnol des bois qui file entre mes jambes alors que je photographie autre chose.
On en apprend aussi énormément sur les espèces. Je compte les oiseaux régulièrement sur un même site et vois d’ailleurs que chaque année leur nombre diminue. On observe aussi plus facilement les cartouches en plastique et les masques laissés dans des endroits improbables… Parfois, on a aussi des bonnes nouvelles. Récemment, j’ai pu observer à l’étang de Beaumont un Butor étoilé qui y est resté plus de deux semaines !
L’hiver apporte beaucoup de sérénité. Le paysage est plus dépouillé. Si on est curieux, cela pousse à regarder des éléments infiniment petits, comme un lichen, une mousse. La couleur du lichen est très esthétique, on va alors lire sur les lichens, c’est une forme de passerelle.
La toile d’araignée qui s’affaisse sous le poids du givre est aussi un grand classique de la photographie de nature en hiver.
En hiver, le comportement des animaux est également différent avec la chasse ; ils s’adaptent.
Elle prolonge l’instant de bonheur… 250 photos et vous en gardez 2 pour raison esthétique : l’enrichissement est culturel et naturaliste. Il y a une certaine forme d’intériorité.
En hiver, il n’y a pas de feuilles donc la visibilité est meilleure. Ce qui est intéressant c’est d’aller au même endroit au cours des 4 saisons et d’observer les changements : espèces, lumière…
La photographie est une porte d’entrée. En général j’apprends toujours quelque chose de la nature par le biais de mon envie de photographier. En observant les lièvres, j’ai par exemple découvert comment me comporter pour parvenir à les immortaliser. Ils voient assez mal et se guident au bruit, on doit donc être attentif à leurs mouvements pour anticiper car ils ont vite fait de détaler ! Lorsque leurs oreilles se relèvent c’est en fait qu’ils sont plus détendus et c’est le moment de déclencher.
La photographie est une porte d'entrée.
Il est évidemment nécessaire de prendre en compte la présence des chasseurs dans la nature en hiver.
Je conseille également de sortir plutôt seul. Avant, j’animais des sorties photos naturalistes avec le Conservatoire d’espaces naturels. Je me rendais toujours seul sur le lieu de la sortie avant pour repérage et faire des photos. J’ai été très heureux de passer des journées entières en solo. Parfois en groupe c’est compliqué et l’on passe à côté de belles choses… en même temps les échanges sont souvent enrichissants.
Oui, un renard qui passe à faible distance et que je dois siffler pour qu’il regarde vers moi et que je puisse le prendre en photo ! Ou encore une cohabitation avec un pic épeiche ou un pic mar qui viennent voir ce qu’il se passe au bout d’une demi-heure de présence !
Ne pas regarder la météo et y aller ! On fait souvent de belles photos sous la pluie.
Renard roux © Martial Queyrie