Le Héron pourpré est un oiseau migrateur qui vient nicher en Europe. En Centre-Val de Loire, sa présence se concentre surtout dans la Brenne, pays aux mille étangs. La nidification de cet oiseau migrateur dans notre région est suivie par des associations gestionnaires d'étangs, notamment en protégeant les roselières, habitat dans lequel il installe son nid.
Le Héron pourpré (Ardea purpurea) est une espèce de la famille des ardeidés (la famille des hérons, aigrettes, butors...).
D’une taille de 70 à 90 cm et d’une envergure entre 120 et 150 cm, il est légèrement plus petit, plus svelte et plus élancé que le Héron cendré.
Il s’en distingue toutefois aisément grâce à son plumage pourpre, particulièrement marqué sur le cou, avec des lignes plus sombres (stries) tout le long de ce dernier.
Le reste de son plumage est gris ardoisé, souvent teinté de brun foncé. Ses pattes sont verdâtres à jaunes.
Les adultes en plumage nuptial ont des couleurs singulièrement vives. Les juvéniles ont un plumage orangé plus uniforme.
Le Héron pourpré est un prédateur relativement opportuniste, avec un régime alimentaire principalement composé de poissons de petite taille, d’amphibiens, de reptiles, d’insectes aquatiques, de micro-mammifères, mais aussi de poussins ou d’oisillons de façon plus occasionnelle.
Il capture ses proies à l’aide de son bec lui servant de harpon, et sa technique de chasse repose du reste sur la méthode de l’affût. C’est une espèce qui se camoufle facilement grâce aux colorations de son plumage, ses stries longitudinales, son allure verticale, correspondant bien au décor des roselières.
Il adopte un comportement placide et furtif avant manifestation d’une proie, qu’il transperce d’un coup de bec vif et élancé.
d'envergure
Nous pouvons retrouver le Héron pourpré de l’Asie centrale à l’Indre, de l’Afrique subsaharienne jusqu’en Europe. Sur notre continent, son aire de répartition s’étend principalement sur les zones méridionales et occidentales, et migre sur le continent africain pour réaliser son hivernage. C’est un migrateur strict en Europe, c'est-à-dire qu'aucun individu de cette espèce ne reste sur son site de reproduction lorsque celle-ci est terminée.
Les habitats préférentiels de l’espèce sont les zones humides vastes (marais, bords de lacs, rivières, deltas…) avec une végétation palustre dense qui lui servent à la fois d’habitats pour la nidification et de zones d’alimentation privilégiées. Ces habitats denses et impénétrables lui assurent la quiétude. Il est très dépendant de la qualité des habitats aquatiques qui influent sur la ressource alimentaire.
Le Héron pourpré est présent en Centre-Val de Loire à partir de la fin mars, et la période de nidification s’étend d’avril à juillet.
L’espèce peut présenter deux écologies différentes pour la reproduction et l’installation du nid.
Première option, le couple s’installe dans une vaste roselière impénétrable, s’épargnant les fortes probabilités de visite d’un prédateur terrestre. Dans cet habitat, le nid est très rudimentaire, il s’agit d’une plateforme de roseaux écrasés, sectionnés et croisés, de façon à constituer une assise au-dessus de la surface de l’eau, dont la cuvette est creusée de manière à épouser la forme du corps. Aucun matériau complémentaire n’est ajouté pour le confort du nid.
Ces colonies peuvent compter quelques couples répartis ça-et-là dans la roselière, à plusieurs dizaines de couples : la roselière peut ainsi ressembler à une vaste plateforme où les nids se côtoient à touche-touche. C’est par exemple le cas d’un étang de Brenne, où plus de 150 couples se côtoient chaque année dans la même roselière !
L’autre écologie concerne des oiseaux arboricoles, qui nichent généralement dans les saulaies et de façon mixte avec d’autres ardéidés, où ils sont susceptibles de côtoyer le Héron cendré, le Héron garde-bœufs, le Bihoreau gris, l’Aigrette garzette ou encore le Crabier chevelu. Ces colonies mixtes sont de véritables « villes » dans les arbres ! Il existe une hiérarchie dans la position des nids en fonction des préférences de chacune des espèces. Le nid est alors constitué d’un amas de branchages.
La femelle pond entre 3 et 5 œufs, incubés par les deux parents pendant 25 à 30 jours environ. Les jeunes commencent à quitter progressivement le nid au bout de 50 jours, et prennent véritablement leur indépendance quelques semaines plus tard encore.
La dispersion des juvéniles débute dès le début du mois de juillet, où il n’est pas rare d’observer des juvéniles vagabonder loin de tout lieu de reproduction connu.
La plupart, adultes comme juvéniles, partent dans le courant des mois d’août et de septembre, certains pouvant s’attarder jusqu’à la fin octobre.
La population européenne hiverne majoritairement au Mali, Nigéria, au Sahel, et au Sénégal.
couples de Hérons pourprés se cotoient dans un étang de Brenne
En France, il y aurait environ 2 000 couples.
C’est une espèce peu commune et localisée dans la région : la population est estimée entre 350 et 400 couples nicheurs. L’essentiel de cet effectif, probablement plus de 75%, est concentré dans l’Indre, au cœur de la Brenne, « pays aux mille étangs » du Berry. Cette région naturelle présente un potentiel d’accueil remarquable pour cette espèce, grâce à son réseau dense d’étangs, pourvus pour certains de vastes ceintures de végétation dont des roselières, habitat de nidification privilégié du Héron pourpré.
couples nicheurs en Brenne en 2024
Le recensement des populations durant l’année 2024 a permis de comptabiliser 336 couples nicheurs en Brenne qui accueille vraisemblablement 10 à 20% de la population nicheuse de France et porte donc une responsabilité majeure dans la conservation de l’espèce.
Le reste du contingent nicheur du Centre-Val de Loire se concentre sur la Sologne, mais quelques couples nichent aussi dans le Cher, l’Indre-et-Loire et le Loiret.
Dans l’Indre, le dénombrement des colonies est principalement réalisé par la Réserve Naturelle Nationale de Chérine, conjointement avec Indre Nature. Dès que cela est possible, les comptages sont réalisés grâce à un drone, avec les dérogations nécessaires et les précautions d’emploi routinières à l’usage de ces technologies, notamment vis-à-vis des éventuelles perturbations sur la faune sauvage. Cette méthode permet un dénombrement plus précis que les recensements effectués au sol, qui permettent surtout d’inventorier les colonies arboricoles sans pouvoir dénombrer celles situées dans les roselières.
En agissant pour la préservation des roselières, les acteurs de protection de la nature en Brenne maintiennent des conditions idéales pour l'accueil du Héron pourpré.
La Réserve Naturelle Nationale de Chérine, le Parc Naturel Régional de la Brenne ou encore Indre Nature jouent un rôle central dans la conservation de cette espèce menacée par la gestion d’étangs abritant des roselières, maintenant ainsi des conditions idéales pour la nidification et l’accueil de cette espèce.
Le Héron pourpré est classé "vulnérable" en Centre-Val de Loire.
Le Héron pourpré est une espèce menacée, en lien avec la disparition et la dégradation de ses habitats. C’est une espèce strictement protégée sur l’ensemble du territoire français, à l’instar des autres ardéidés.
À l’échelle internationale, il est classé comme « préoccupation mineure » par l’Union Internationale pour la Conservation de la Nature (UICN).
En Centre-Val de Loire, il est classé « vulnérable ».
Localement, les menaces se traduisent notamment par l’intensification des pratiques piscicoles, et notamment l’élevage intensif de la carpe qui conduit à rendre les eaux turbides. Par ailleurs, des pratiques comme le faucardage ou le démottage mènent également à la disparition des habitats de l’espèce et de l’avifaune patrimoniale de Brenne.
La gestion et le partage de l’eau entre les différents acteurs du territoire (en pisciculture, agriculture, loisirs, gestion d’espaces naturels) est également une problématique prégnante en Brenne, et qui le sera certainement de plus en plus à l’avenir dans une perspective de changement climatique et du régime pluviométrique.
Le maintien de niveaux d’eau élevés, en période de nidification, est essentiel pour le maintien des colonies : un étang assec ou insuffisamment rempli provoque immédiatement l’abandon d’une colonie. Ces changements importants, d’une année sur l’autre, peuvent être source d’instabilité dans la constitution des colonies et dans le déroulement de la saison de nidification et du succès reproducteur.
En 2019, Indre Nature a engagé une convention de gestion avec le propriétaire de l’étang Pisseloup, situé sur la commune de Vandœuvres, dans l’est de la Brenne, afin de favoriser le maintien de la végétation aquatique naturelle, très riche. La confiance s’étant installée, Indre Nature a pu co-acquérir Pisseloup en 2023, avec la Ligue de Protection des Oiseaux (LPO) et le WWF, avec l’aide de la Région Centre-Val de Loire et en faisant appel aux dons de ses adhérent·es.
Pisseloup est un étang de 13 hectares, enserré de saules et de carex. Il accueille presque chaque année une colonie de guifettes moustac. D’autres oiseaux remarquables s’y reproduisent, dont le héron pourpré : canards souchet, colvert, chipeau, fuligules milouin et morillon, sarcelle d’hiver, grèbes huppé et castagneux... L’étang abrite l’une des plus grandes zones de nénuphars blancs de la Brenne. Les tortues cistudes sont abondantes et pondent sur la digue et dans la prairie adjacente. Sa gestion a été confiée à Indre Nature.
Héron pourpré juvénile © Martial Queyrie
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